Sur la trace du Serpent, part 4.

Un petit cimetierre dans la campagne basque, L’occasion en réalité pour s’échanger des informations. Et avoir des explications. Le Silencieux fut bien obligé cette fois de rompre le silence.

  • Quatre d’entre-nous ont été tué et tout ça pourquoi ? Tu veux me dire ?
  • Ces salopards font du trafic d’enfants !
  • Et en quoi ça nous concerne ? Tu as pensé aux tiens d’enfants ? Tu as pensé à ta femme, à mon mari ?
  • Arrête Eliane, coupa une autre fille. Il a raison on ne peut pas laisser faire ces salopards.
  • Non mais vous vous êtes vu, vous vous prenez pour qui ? Des justiciers ? Ces gens là sont des sauvages, vous avez bien vu bon Dieu !

Depuis le téléobjectif le spectacle était intéressant et instructif. Les deux gars cachés au fond du cimetière n’en perdaient pas une miette. Un type à Bordeaux les avait équipé et payé et ils n’étaient pas du genre à poser des questions passé une certaine somme. Ils ne savaient pas exactement qui était quoi, tout ce qu’on leur avait demandé c’était de capter les conversations avec le micro directionnel et des photos. La discussion semblait animée. On ne pleurait pas ses morts, on se disputait, puis un homme apparu de nulle part, manteau noir, les cheveux argentés coupés courts et il parla quelques instants avec le groupe.

  • Je suis désolé de ce qui arrive c’est de ma faute, dit Charlie en apparaissant d’entre les tombes.
  • C’est qui ? Demanda Eliane.
  • Un vieil ami, expliqua Estéban, tu n’étais pas encore dans le réseau.
  • Charlie ? S’exclama un autre. Je te croyais mort !
  • Salut Alban, non j’étais en voyage dans les iles…
  • T’étais en taule ?
  • Non, non en voyage je te dis.
  • Quelqu’un peut m’expliquer, demanda alors une des femmes.
  • Allons manger, je vous raconterais tout et vous déciderez, répondit Charlie.

La photo qui accompagnait le dossier des israéliens décrivait un Charlie Ira dans la trentaine, sur un cliché à gros grain, mais grâce aux photos prises dans le cimetière et l’aide de Bobo, on put dès lors transmettre son visage à tout le clan, toutes les têtes du réseau et certain de leur subalterne. Si on voyait ce type, il devait impérativement mourir, et sinon, si on pouvait le maitriser, Andréa se ferait un plaisir de s’occuper de lui avec le manchot. Ainsi dans leur ignorance, les membres du réseau liberté et fraternité furent mis sous surveillance discrète et permanente. Finalement Dritan et Andréa décidèrent que trois meurtres étaient insuffisants, car visiblement ils travaillaient toujours ensemble. Une expédition punitive s’imposait mais ils renonçaient à s’en occuper eux-mêmes. Considérant ce qui s’était déjà passé en Espagne, la Fabrika devait se faire discrète, sous les radars. On passait donc la main aux corses et plus exactement à André et ses relations. L’intéressé connaissait justement un gang de motard porté sur les croix gammées et les uniformes noirs qui répondait au doux nom des White Wolf. Contre vingt-cinq mille euros et un kilo de cristal de méthédrine, ils se chargeraient d’autant avec joie du problème que l’ETA c’était tous de sales gauchistes et qu’ils adoraient se taper du gauchiste. Sauf que cette fois il ne s’agirait pas de frapper mais de tuer, tout le monde, les hommes en priorité, enfant ou non, et avant ça de violer leur femme devant eux. Andréa avait laissé des instructions précises. Il voulait également que ça soit filmé et on enverrait les images aux autres. Plus personne ne devait aider l’irlandais. L’expédition aurait lieu la nuit, et la cible s’appelait Estéban Etcheverry et sa famille. Pourquoi lui ? Pourquoi pas. L’exemple devait être édifiant, la cible importait peu.

Quand il avait eu vingt ans, Charlie avait fait trois ans à Belmarsh au nom de la Cause. Trois ans durant lesquels les vieux taulards lui avaient enseigné leurs trucs. Notamment pour échapper à une fouille et toujours garder un petit quelque chose sur soi. José junior avait échappé à la baignoire d’acide mais pas à l’amputation, les amis d’Estéban avaient payé le prix fort, Charlie commençait à douter. C’était une chose de rentrer en croisade mais il n’était pas certain que les autres étaient prêt à devenir des dégâts collatéraux ni lui à l’assumer. Au reste, il avait mis la pression à leur organisation mais le prix à payer était aussi élevé que le résultat peu probant. Le trafic continuait, le Serpent était toujours libre et lui et ses amis, objectivement en danger. De plus les Chevaliers l’avaient averti, s’en prendre aux albanais c’était également s’en prendre à leurs associés les plus fidèles, la N’dranghetta. Or c’était elle qui fixait désormais les règles en Europe, notamment sur le marché de la cocaïne. S’en prendre à un réseau c’était une chose, affronter la mafia s’en était une autre. Certes il avait les moyens, des moyens dont aucune police ne bénéficiait, mais l’argent ne fait pas tout et son organisation informelle n’avait quasiment aucun pouvoir sinon celui limité de la nuisance. Il ne voulait pas nuire, il voulait anéantir. Après la découverte des restes d’Amezcoa il avait décidé qu’il était temps de prendre une pause et de réfléchir. Il connaissait Maurice. Ils avaient partagé du temps ensemble dans le passé et le vieux avait en partie fait son éducation politique en lui parlant du fascisme en Europe et de l’histoire de la lutte armée. Maurice les avait aidés dans la surveillance des albanais. Le prix qu’il avait payé pour ça était hors limite. Et Maria Salvida était une amie d’Estéban, elle qui avait fourni la dynamite. L’un dans l’autre le prix du sang était couteux de leur côté tandis que les albanais semblaient pouvoir produire des soldats indéfiniment. Alors il était reparti en Thaïlande retrouver les enfants, Noémie et essayer de réfléchir à un nouveau plan d’attaque. Les enfants grandissent vite. En deux mois Noémie avait pris quatre centimètres, baragouinait quelques mots de russe et de kurde, avait appris aux autres enfants des gros mots en français et en anglais, et, au dire de Pierre et de l’institutrice avait un peu oublié ce qu’on lui avait fait subir. Charlie en doutait. Peut-être s’était plus ou moins remit du traumatisme mais elle lui avait montré comment elle se servait de son balafon et ça n’évoquait pas le pardon.

  • Comment ça s’est passé ? Lui demanda-t-elle un matin alors qu’il venait d’appeler Llana.

Elle avait été froide, deux mois qu’il ne lui avait pas donné signe de vie, prit qu’il était par sa croisade, et ses excuses autant que ses explications n’avaient sans doute pas suffit. Et ça aussi c’était un prix à payer. Une douleur même, il s’était attaché à la jeune femme, ou bien était-ce l’âge, le sentiment qu’il vivait ses derniers amours qui l’attachait exagérément, il n’en savait rien. Il leva les yeux sur sa petite-fille.

  • Quoi donc choupette ?
  • Avec les méchants.
  • Ils ont morflé.
  • Sont tous morts ?
  • Pas encore.
  • Je veux qu’ils meurent tous !
  • Je sais.
  • Pourquoi tu te fais pas aider par Éric ?
  • Tu sais je crois qu’Éric aujourd’hui il a envie d’être tranquille. Et puis ce n’est pas un magicien, il ne peut pas résoudre tous les problèmes.

Lui aussi pensait à Lord et se demandait ce qu’il faisait aujourd’hui. Mais qu’est-ce qu’il pourrait faire de plus ce qu’il n’avait pas encore réussi à accomplir ? Si seulement il pouvait mettre la main sur ce Serpent, ou au moins son chef. Dritan Begari ne devait pas être plus intouchable que les autres. Mais ces gens-là savaient rester sous les radars. Les Chevaliers lui avait donné accès à tout ce qu’ils avaient récolté mais il avait l’impression de se casser les dents sur un mur. Connaitre une partie de leur circuit de blanchiment, même le gripper, ne suffisait pas. Pour bien faire il aurait fallu qu’il tape sur un point névralgique mais même des tonnes de billets cramés ne suffisait pas.

  • Alors c’est pour eux que tu fais ça ? Demanda Aslan en s’approchant alors qu’il regardait les enfants s’amuser sur la plage avec l’institutrice.
  • Pour peut-être pas mais à cause, sûrement.
  • C’est bien ce que tu fais, Dieu te le rendra.
  • Tu sais moi Dieu….
  • Tu n’y crois pas ?
  • S’il existe je crois que c’est surtout lui qui ne croit pas en l’homme.
  • Hum… et moi qui croyait tous les hommes riches mauvais. Mais toi tu es de ceux qui se posent des questions.
  • Bof, et puis je suis riche par hasard tu sais, j’ai pas encore eu l’occasion de me pourrir sur pied.
  • Tu as peut-être raison, c’est peut-être une question de temps. Quand j’étais videur à Londres, on avait un client, un libanais qui venait souvent faire la fête. Le genre à claquer vingt mille balles rien qu’en champagne, un type sympa et tout qui lâchait toujours un gros billet même à nous autres les videurs. Une vieille fortune à ce qu’il parait.
  • Et alors ?
  • Et alors un jour j’ai appris que son truc c’était…

Il fit un signe de tête écœuré vers les enfants.

  • Oh… et comment il s’appelait ?
  • Michel Karbaoui.
  • Et il vit où ?
  • Au Liban je t’ai dit mais il a un appartement à Londres, pourquoi ?
  • Je ne sais pas, mais s’il aime les mômes j’ai peut-être deux mots à lui dire.
  • Pourquoi lui ? Rien qu’en Thaïlande tu pourrais….
  • Noémie allait être vendue au large du Liban et tous les acheteurs potentiels ont été tués.
  • Oh…

Ça l’éloignait peut-être du Serpent et son réseau mais peut-être que ça l’aiderait, il n’en savait rien, à ce stade c’était la seule idée qu’il avait pour sortir de l’impasse. Quelques jours plus tard il faisait de nouveaux ses adieux aux enfants et expliquait au tchétchène qu’ils retournaient en Europe. Après quinze ans passés à l’ombre, le Silencieux goutait aux siens comme des retrouvailles chaque fois renouvelées. Il s’enchantait de leur présence, jouait avec ses enfants le plus possible et ne voulait plus pour rien au monde être séparé d’eux trois. Pourtant quand Charlie lui avait parlé de réseau pédophile il n’avait pas hésité une seconde. Etchéverry était un homme de principe mais au-delà de ça il lui suffisait de regarder ses propres enfants pour se dire que c’était l’occasion ou jamais de s’en prendre à leurs prédateurs. Consuela n’était en revanche pas de cet avis.

  • Quinze ans ça t’a pas suffi !? A la première occasion de refaire des conneries tu remets ça !?
  • Des conneries ? Tu sais ce qu’ils font aux gosses ces gens-là !?
  • Non et je ne veux pas le savoir, ce ne sont pas nos enfants que je sache ! Et en plus tout ça pour un vieux copain !? Où il était lui ces quinze dernières années !? Il est venu te voir !? Il s’est occupé de ta famille !? Hein dis-moi que je sache ce qu’il a fait qui vaille mieux que ce que j’ai fait moi !
  • Pourquoi le chien aboie ? Demanda soudain le Silencieux en regardant en direction de la fenêtre de la chambre.
  • Mais qu’est-ce qui te prends à la fin, je te parle de nous et tu me parles du chien !?

Il se leva et s’approcha de la fenêtre sans l’écouter. D’un coup le chien se tue laissant place au silence de la campagne.

  • Qu’est-ce qu’il y a ? Demanda-t-elle sentant que quelque chose n’allait pas.

Mais soudain dans un fracas de verre quelque chose de lourd et sombre traversa la fenêtre et heurta Estéban en pleine poitrine. Consuela poussa un hurlement, c’était le chien, sa tête. Au même moment du bruit et des cris retentirent dans la pièce à côté. Estéban ouvrit un tiroir pour attraper son arme quand le tiroir éclata avec une partie de la table, le temps de sauter en arrière et de se retourner, un type chevelu les menaçait avec un fusil à pompe.

  • Fait pas l’con coco et va rejoindre tes mômes.

Francesco était par terre sous le talon d’un autre chevelu qui le tenait en joue du bout de son fusil, et Julia criait, tenue comme un paquet par un troisième dont Estéban remarqua la croix gammée qu’il avait cousu sur sa veste en cuir. Deux autres gars, un grand costaud et un plus petit, se tenaient dans le hall, également armés.

  • Aaah v’là les rois de la fête !
  • Alors le terro, on a repris du service ! Dit le plus grand. C’est pas bien ça, va falloir qu’on te donne une leçon…
  • Laissez ma famille tranquille, elle n’a rien à voir là-dedans.
  • Ah non moi j’crois pas, ricana l’autre.
  • Hey ! Regarde ! Dit celui qui était sur Francesco et qui visait maintenant sa tête.

Estéban vit le doigt glisser sur la détente, Consuela poussa un cri, Et puis ce fut la tête du chevelu qui se dispersa aux quatre coins de la pièce. Le grand attrapa Consuela par le bras quand sa tête à son tour s’ouvrit et se referma pour cracher de la matière cérébrale sur Estéban. Puis soudain un colosse barbu entra dans la maison, armé d’une hache de combat qu’il planta d’abord dans le crâne du plus petit avant de trancher le bras qui tenait la gamine comme un sac. Il allait lui asséner le coup de grâce quand Eliane entra un pistolet à la main

  • Non, non, garde-le en vie faut qu’on l’interroge

Le tchétchène, le visage éclaboussé de sang, eut un sourire féroce.

  • Où cuisine s’il vous plait ? demanda-t-il à une Consuela sous le choc, et alors qu’entrait le reste du groupe, tous armés.
  • Euh… par là…

Il attrapa l’amputé par le moignon et lui grogna.

  • Vient on va te soigner toi.

Du sang partout, la famille et Estéban sous le choc, qu’est-ce qui se passait exactement ? Qui était ces brutes !? Comment ça se faisait qu’ils étaient tous là ? Estéban ne manquait pas de question quand un hurlement retentit depuis la cuisine.

  • Qu’est-ce que…

Aslan ressortait de la cuisine sa victime sous le bras, le moignon sauvagement cautérisé. Ça sentait la chair brûlée jusque dans le salon.

  • Eh on pouvait pas laisser lui vider de son sang ! Dit-il dans un mauvais français alors que tout le monde le regardait atterré.
  • Faites pas attention, il est juste un peu brut de décoffrage, dit alors Charlie en entrant à son tour avec son fusil de précision. Va le mettre dans le coffre.
  • Ouais chef !
  • Quelqu’un peut nous expliquer !? S’écria alors Estéban
  • L’autre jour dans le cimetière, on nous surveillait, expliqua Eliane.
  • Mais comment vous saviez ? Pourquoi vous nous avez rien dit ?
  • C’est Aslan qui les a repérés mais on ne savait pas qu’ils allaient viser, j’ai prévenu les autres mais toi t’es injoignable dans ta putain de montagne.
  • Dites plutôt que vous vous êtes servi de nous comme appât ! Accusa Consuela.
  •  Eh bien oui ! S’écria alors Eliane, il fallait bien qu’on sache et qu’on les attrape tous !
  • Espèce d’enfoiré, fit Estéban à l’adresse de Charlie.
  • Il n’était pas d’accord, précisa un des hommes présents, il trouvait ça trop dangereux. C’est nous qui avons pris la décision.
  • Et pourquoi vous nous avez pas prévenu ?
  • Pour les raisons qu’il a donné, on n’arrivait pas à te joindre et venir aurait risqué de les alerter.

Les enfants étaient en pleur, des cadavres partout et le boulot qui n’était pas terminé, Charlie grinça :

  • Bon les gens serait peut-être temps de tout nettoyer et de s’occuper des petits parce que l’espérance de vie de l’autre doit plus être longue et faut qu’on cause lui et moi.
  • Je viens avec vous, expliqua Eliane, je veux savoir ce qu’il a à dire.

Il saurait tous de toute façon mais cette femme n’inspirait pas la contradiction. Ils repartirent à bord de la Subaru qu’ils avaient loué et allèrent se perdre dans la campagne jusqu’à trouver une grange vide. Quelques minutes plus tard Charlie expliquait au type ce qu’il attendait de lui.

  • Voilà le topo mon grand, t’as perdu pas mal de sang mais tu peux encore rester en vie si on t’amène à l’hôpital. Seulement pour le moment j’ai besoin que tu me dises qui vous a engagé.
  • Va te faire foutre.
  • Bon, j’ai pas été assez clair on dirait.

Il poussa la pierre qu’il avait glissé sous ses pieds.

  • Vu ta corpulence, et le fait qu’il te manque un bras et du sang, je pense que tu vas t’étouffer pendant cinq bonnes minutes, c’est long cinq minutes tu vas voir…

Suspendu au bout d’une corde juste assez longue pour qu’il ne touche pas terre mais ne se rompt pas le cou, le type se balançait en gargouillant, le visage violet. Puis il se mit à battre de la main comme s’il voulait parler. Charlie fit signe à Aslan de remettre la pierre.

  • C…c’est… c’est André qui nous a engagé !
  • Qui c’est ça André ?
  • André Agostini, il travaille pour les corses.
  • Les corses ? Qu’est-ce qu’ils viennent encore foutre dans cette histoire !? Ronchonna Charlie.
  • J… Je s… sais pas…. s’il vous plait emmenez moi à l’hôpital je me sens mal !
  • L’hôpital ? Nan pour toi ça sera la morgue, répondit Charlie en l’abattant. Une balle dans le crâne, une autre dans le sternum.
  • Pourquoi vous l’avez tué !? Il aurait encore pu nous dire ce qu’il savait !
  • Non, c’est juste un pousse-bouton, il ne savait rien. Mais vous inquiétez pas je vais vite savoir moi.

Et quand il sut, il se sentit maudit.

  • Putain de foutu Santonie vont jamais me lâcher ceux-là !
  • C’est qui ? Demanda Aslan alors qu’ils roulaient vers Beyrouth.
  • Des emmerdeurs, à cause d’eux ma fille et mon beau-fils sont morts.
  • Oh désolé… et tu t’es vengé ?
  • Oui mais visiblement ça n’a pas suffi.
  • La vengeance est un chemin sans fin.
  • Ouais ? Bin crois moi que dès que j’en ai l’occasion je vais te faire mentir.

Les Chevaliers avaient une nouvelle fois fait leur boulot. Plus besoin de surveiller ses citoyens quand ces crétins le faisaient eux même en racontant leur vie sur Facebook. Cette vieille plateforme sur laquelle des messieurs de l’âge d’André Agostini s’exhibaient avec leurs belles motos de dangereux loubard du dimanche. Et André n’échappait pas à la règle, posant avec arme et moto devant sa villa. A rajouter aux slogans nationalistes sur sa page et des liens sur des scandales financiers dans l’ile. Agostini aimait se donner une image de gars engagé, les Chevaliers avaient rapidement découvert dans quoi. Le responsable sécurité de la famille maudite. Comment était-il rentré en contact avec les albanais, est-ce que c’était lié à lui directement, pour le moment il s’en fichait bien. Pour le moment il avait une visite à faire chez un certain Karbaoui Michel, vieille fortune libanaise, banquier pour le compte d’HSBC, et selon Aslan, pédophile patenté. De ça les Chevaliers n’avait pas pu être garant, et il espérait quand même qu’Aslan avait entendu plus qu’une rumeur.

  • C’est mon cousin qui m’a raconté ça, il était à une fête chez lui à Londres et il n’y avait que des enfants… tous nus…
  • Et t’as confiance en ce qui raconte ton cousin ?
  • Bah parfois il exagère les choses, mais ça je crois pas qu’il l’ait inventé.

Appartement 502, cinquième étage dans le quartier cossu des ambassades. Il avait pris rendez-vous et insisté pour le voir chez lui. Monsieur Charles Gunn, richissime homme d’affaire, une fortune estimée à dix milliards de dollars. Karbaoui s’était renseigné et les Chevaliers s’étaient chargés de l’intoxiquer. Il n’avait pas renâclé à le recevoir chez lui, on ne contredisait pas les caprices d’un milliardaire quand on était un banquier digne de ce nom, surtout qu’il lui avait parlé d’une affaire à traiter avec discrétion. Il s’agissait d’un duplex en réalité, quelque chose qui devait approcher les deux ou trois cent mètres carrés. Et première surprise, ils furent reçus par madame son épouse.

  • Ruth Karbaoui, enchantée, mon mari vous attend dans le salon.
  • Enchanté également Charles Gunn et voici mon assistant, Aslan, dit-il alors que ce dernier baissait la tête pour passer la porte.

Michel Karbaoui était de l’espèce métrosexuel bronzé à l’année, soigneux de sa personne et de sa silhouette dynamique. Il portait des vêtements de marque, des mocassins en daim, sans chaussette, très détendu et souriant. Pas du tout l’idée qu’il s’était fait de lui. Et puis la présence de sa femme le troublait. Les pédophiles ça se mariait ? Bien entendu il y avait l’exemple de Fourniret mais ceux-là sentaient la crasse, la méchanceté, la bêtise, les crimes crapuleux, là où ce couple respirait réussite et bonheur de vivre. Ils se présentèrent et puis Charlie l’entama sur l’objet supposé de sa visite.

  • Je voudrais investir à Dubaï seulement je ne suis plus le bienvenu là-bas depuis que j’ai été en procès avec une de leurs entreprises.
  • Oh, j’en suis désolé.
  • Vous m’avez expliqué que vous aviez de bonnes relations là-bas, j’aimerais que vous m’en disiez plus.
  •  Avant ça me permettez-vous de vous poser quelques questions.
  • Je vous en prie.
  • De quel genre de somme parlons-nous ?
  • Pour commencer je voudrais investir deux millions mais si je vois que les affaires sont intéressantes, il y aura plus, beaucoup plus…
  • La provenance de cet argent est légale ou illégale ?
  • Illégale, ça pose un problème ?
  • Non, bien entendu, c’est seulement pour savoir par quel circuit nous pourrions le faire passer.
  • Il faut que ça soit absolument intraçable.
  • Oui bien entendu.
  • J’ai des enfants vous comprenez, je ne voudrais pas qu’ils héritent de mauvaises affaires.
  • Oui je comprends.
  • Vous avez des enfants vous-même ?
  • Nous n’avons pas cette joie, expliqua alors mécaniquement madame.

Pendant un instant il se demanda si elle pouvait en avoir.

  • Ce n’est pas ce que j’ai entendu dire.
  • Ah oui ? Hélas non, je ne peux pas en avoir, expliqua alors le banquier avec un sourire, mais permettez-moi, dans quel genre d’affaire vous pensez investir.
  • Non vous préférez les baiser, fit Charlie avec un sourire et un clin d’œil.
  • Je vous demande pardon ?
  • Allons… pas de cachoterie entre nous cher ami, on vous a vu à Londres.
  • Je ne vois absolument pas de quoi vous parlez, et d’ailleurs je trouve cette allusion tout à fait déplacée !

Charlie se rendait compte qu’il jouait un peu sur le fil. Il n’avait aucune preuve à produire pour ce couple modèle. Et même il commençait à douter. Et si le cousin d’Aslan avait voulu se faire mousser en racontant cette histoire. Mais l’intéressé justement avait de la suite dans les idées.

  • Pardonnez-moi, où sont les toilettes s’il vous plait ?

Troublé, autant par les allusions de l’un que la demande du second, monsieur indiqua vaguement un chemin.

  • Venez, je vous en prie, je vais vous montrer, dit la femme avec une politesse froide.
  • Oui… vous savez je ne vous fait pas la morale remarquez, chacun ses mœurs n’est-ce pas, continua de badiner Charlie, mais j’aime savoir avec qui je travaille n’est-ce pas…
  • J’ignore totalement de quoi vous parlez, et je trouve votre curiosité à mon égard malsaine !
  • Oh allons, malsaine, comme vous y allez, je suis juste un homme d’affaire prudent !

Deux minutes plus tard Aslan revenait, la femme derrière lui.

  • Dites c’est quoi ça ? Demanda-t-il en exhibant un bavoir de sa poche.
  • Où est-ce que t’as trouvé ça ?
  • Panier à linge.
  • De quel droit vous fouillez chez nous !? S’écria alors le banquier.
  • Tombé par terre, répondit laconiquement Aslan en anglais.
  • Ah… euh… ça doit être au fils de la bonne… euh nous lui autorisons à venir faire son linge ici, bafouilla-t-il.

Et pendant quelques instants Charlie se dit qu’ils étaient en train de complètement se fourvoyer. Il bafouillait mais il avait l’air parfaitement sincère, et un peu scandalisé, ce qui était bien normal. Mais il se passa alors quelque chose de tout à fait imprévu.

  • Ca suffit vous deux ! Mains en l’air !

La femme tenait un calibre dans la main, un neuf millimètres pour sac à main. Elle avait profité de conduire Aslan pour récupérer l’arme.

  • Mais chérie qu’est-ce que tu fais !?
  • Tu vois pas qu’ils nous baladent ces deux-là !

Le type sourit, forcé.

  • Nous balade chérie ? De quoi parles tu mon amour ?
  • Mais arrête un peu de faire l’imbécile pour une fois ! Tu vois pas qu’ils savent !
  • Mais ils savent quoi !? Continua-t-il sur le même ton, et sourire forcé.
  • Oh la, la, des fois tu me fatigues tu sais ! Allez tous les deux on se lève et on va par…

Elle ne termina pas sa phrase. Vif comme un serpent le bras d’Aslan se détendit et attrapa sa main armée. Elle tenta de lutter contre lui, mais que pouvait-elle faire contre un colosse fabriqué de muscles ? Il commença à attirer le canon de son pistolet vers sa tête. Elle appuya sur la détente. La première balle frôla la tête du géant. Alors le banquier tenta de se jeter dans ses jambes et le faire tomber. Mais au même moment Aslan retournait l’arme contre le menton de la femme et la forçait à appuyer sur la détente. Sa cervelle alla gicler au plafond. Son mari hurla :

  • RUTH ! NON !

Il se précipita sur le cadavre de sa femme.

  • Oh non… non… qu’est-ce que vous avez fait… ma chérie… Ruth…
  • On dirait bien que votre femme vous a trahi, fit remarquer Charlie alors qu’Aslan braquait le banquier.
  • ASSASSIN ! ASSASSIN ! Vous avez tué ma femme ! je vais vous dénoncer ! AU SECOUR !
  • L’inconvénient des grands appartements j’ai remarqué, c’est qu’ils dispersent le son, de plus je vous ferais remarquer que vous avez du double vitrage. C’est bien ça aussi.
  • Assassin !
  • Oui tu l’as déjà dit, fit Charlie en changeant soudain de ton. C’est le passé, elle est morte et elle reviendra pas, parlons du présent maintenant, le tien, c’est quoi ce bavoir ? De quoi elle parlait ta femme ? Qu’est-ce qu’on sait exactement ?
  • Allé vous en ! Vous ne voyez pas que vous avez assez fait de mal comme ça !?
  • Y’a nulle part où accrocher une corde ici, fit remarquer le colosse en regardant le plafond.
  • C’est pas grave, on va improviser…. Tu peux soulever combien tu dirais ?
  • De quoi vous parlez !? Qu’est-ce que vous allez me faire !?
  • On te pose des questions tu me parles de ta femme, alors on va insister. Tu crois qu’on peut monter sur le toit d’ici ? demanda-t-il en s’adressant au tchétchène.
  • Je pense ouais…

Il empoigna le banquier par le bras et l’obligea à se lever, le poussant vers l’escalier qui menait à l’étage supérieur malgré ses protestations et ses cris.

  • Attend, dit soudain Charlie.

Il venait de passer devant une chambre ouverte, avait crut apercevoir quelque chose dans le reflet d’un miroir. Il poussa la porte et entra, sentant une présence, sortit l’arme qu’il avait sous sa veste. Un placard légèrement ouvert avec des miroir partout dans la pièce. Il pointa le canon sur la porte du placard et ouvrit brusquement.

  • Oh putain de ta mère !

Un gosse d’à peine quatre ou cinq ans, sous-alimenté, fiévreux, enchainé. Charlie sorti de la chambre d’une traite et planta son 45 sous le menton du banquier ;

  • Combien il y en a ? Y’en a d’autres ?
  • Mais… de… de quoi parlez-vous ? sourit l’intéressé en forçant sur ses traits.

Charlie lui tira une balle dans le pied. L’autre hurla, toujours maintenu par le bras par le colosse.

  • Fait encore une fois le mariole pour voir.
  • TROIS Y’EN A TROIS ! Les deux autres sont dans la chambre du dessus !
  • Qu’est-ce qu’on fait ? Demanda Aslan qui avait compris.
  • On s’en occupera après, on a des choses à se dire monsieur le banquier et moi…

Quelques minutes plus tard le banquier hurlait et se pissait dessus, la tête dans le vide, maintenu à bout de bras par Aslan.

  • Alors on va jouer un jeu, je vais te donner des noms et tu vas me dire si tu les connais.
  • NON ! NON ! AU SECOUR !
  • On est à Beyrouth dans un quartier chic coco, personne viendra… dis donc j’y pense c’est pas ta Rolls en bas ?
  • AU SECOUR !
  • Réponds à mes questions et on te file juste aux flics, sinon tu vas allé voir ta voiture.
  • Remontez-moi ! Je vous en supplie !
  • Dritan Begari ? Ca te parles ?
  • NON ! non !
  • Bon et Andréa Brajov, alias le Serpent ça te dis quelque chose !
  • OUI ! OUI ! On a fait affaire ensemble ! Oui !
  • Bon, on avance… Et qu’est-ce que tu peux me dire sur lui.
  • Remontez-moi ! Je vous en supplie remoooontez moi !
  • Plus vite t’auras parlé plus vite tu retrouvas le plancher des vaches, dépêche-toi !
  • J… je… sais r… rien de lui… je fais affaire avec Troi d’habitude.
  • Troi ? Comme le chiffre trois ?
  • Oui ! Oui !
  • Et c’est qui celui-là ?
  • J… Je… ne sais pas… il achète, il vend, c’est le comptable j… je… crois.
  • Bingo ! S’exclama Charlie, et on peut le trouver où ce comptable ?
  • Remontez-moi ! Remoooonteeez-moi !

Il était hystérique, Charlie fit signe à Aslan de le remonter.

  • Alors je t’écoute, comment tu le rencontre ce Troi ?

Il avait un numéro et un code convenu chaque fois qu’il avait quelque chose à vendre ou qu’il voulait acheter. Charlie l’obligea à appeler.

  • Sur le port d’Amsterdam y’a des marins qui chantent…
  • Arrête de déconner, d’abord on n’est pas à Amsterdam ensuite c’est pas le moment.
  • Je dis ça parce que y’a des putes là-bas.
  • Y’a des putes dans tous les ports, Hambourg comme ailleurs.
  • Il lui a donné rendez-vous où déjà ?
  • Au Tortue. J’ai déjà loué une suite.

Ils étaient venus par le train. Ils prirent un taxi jusqu’à l’hôtel de luxe où le personnel de monsieur Charles Killian avait réservé la suite junior. Troi devait venir en fin de matinée. Le temps de réfléchir à comment on allait s’y prendre, et de nettoyer les armes. Il avait été obligé de faire venir du secours pour les enfants que les autres gardaient enchainés chez eux, deux garçons et une petite fille, tous palestiniens. Le Liban était au bout du rouleau mais c’était toujours la même chanson, quand on avait de l’argent on avait droit au meilleur où qu’on soit. Les enfants furent évacués sur une clinique privée à Tel Aviv. Il n’avait pas repris contact avec les basques. Il leur avait assez attirer d’ennuis comme ça et il se sentait coupable de ce qui était arrivé aux autres. Karbaoui avait arrangé un rendez-vous, déclaré qu’il voulait présenter de nouveaux clients mais il ne serait pas de l’affaire. Le remettre aux autorités n’aurait servi à rien. La corruption endémique qui régnait au Liban était un sauf-conduit contre tous les crimes, même les pires. Lui et sa femme dormaient dans le port. Et pour le reste de la communication avec l’albanais, il usait du gadget de Lord qui imitait les voix à la perfection.

  • Allo, Michel ?
  • C’est moi.
  • Je vais avoir du retard, un empêchement, peut-être pourrions-nous voir demain ?

Instinctivement il se dit qu’il était en train d’essayer de la lui faire à l’envers. Peut-être qu’ils s’étaient fait repérer, peut-être qu’il se méfiait et cherchait à gagner du temps.

  • Oh c’est ennuyeux, mon client doit justement repartir demain.
  • A quelle heure ?
  • Attends je vais lui demander… sept heures.
  • Ah, en effet c’est ennuyeux, et là, tout de suite il peut se libérer ? J’ai qu’une heure de libre.
  • Euh… oui je pense que ça doit être faisable, tu es où ?

Il lui donna une adresse dans la vieille ville, Altstadt, un café à l’angle d’une rue cossue. Karbaoui lui avait fait une description du personnage et il n’était pas certain de le reconnaitre. Mais il savait déjà comment le trouver. Il suffisait de le faire sonner. Et ça ne rata pas. Un type banal, avec la tête de l’emploi. Le genre qu’on ne remarquait pas, jamais, et qui calculait. Il s’approcha avec un grand sourire, Aslan derrière lui.

  • Charles Killian, enchanté, je suis désolé Michel n’a pas pu venir.
  • Ah ? Euh… et pourquoi ?
  • Figurez-vous qu’il a attrapé le Covid.
  • Ah oui je vois, bien sûr…. Euh je vous en prie, asseyez-vous… ce monsieur est votre… ?
  • Mon assistant, il est au courant de tout.
  • De tout ?
  • Pour… euh… la marchandise.
  • Ah oui bien entendu !

C’était le mot que Karbaoui avait employé à l’endroit des enfants, de la marchandise. Charlie n’avait strictement rien éprouvé en le faisant passer de vie à trépas.

  • De quel sommes parlons nous en ce cas ? Demanda le comptable avec un sourire poli.

Charlie ouvrit la sacoche qu’il avait amené avec lui, que des Ben Laden, en liasses de vingt.

  • Intéressant. Combien il y a ?
  • Deux millions. Mais j’achètes pas sans voir.
  • Bien entendu. Voudriez-vous ce soir, vers vingt heures, le temps de préparer la marchandise ?
  • On peut pas faire ça maintenant ? Michel vous l’a dit je suis pressé.
  • Euh… eh bien c’est-à-dire que la marchandise a voyagé et…
  • Ce n’est pas important, dit sèchement Charlie. Pas question de lui laisser l’occasion de foutre le camp, et c’était bien l’impression qu’il lui laissait.
  • Très bien comme vous voudrez, vous êtes venu comment ?
  • En taxi.
  • Ah, et comment comptiez-vous ramener la marchandise ?
  • Ah, oh j’ai des employés qui s’en chargeront demain, c’est possible d’en prendre livraison demain n’est-ce pas ?
  • Mais bien entendu… Je crois avoir compris, vous ne voulez pas être là quand ils en prendront possession.
  • Exactement.

Troi sourit.

  • En ce cas veuillez me suivre s’il vous plait

Ils sortirent du café pour se rendre dans une ruelle de la vieille ville. La ruelle était déserte en dehors d’un Kangoo mais au cas où Charlie gardait la main sur son calibre.

  • Venez, montez, dit-il en passant derrière le volant.

Aslan se tassa comme il put à l’arrière, Charlie pointait discrètement son arme sur Troi.

  • Ça fait longtemps que vous connaissez Michel ? Demanda-t-il sur un ton badin en sortant d’Altstadt.
  • Non, nous avons été présentés par des amis communs.
  • Et comment va Ruth ?
  • Bien mais selon Michel c’est elle qui lui a refilé le covid.
  • Une forme grave ?
  • Michel ça lui fait une grosse grippe, Ruth je ne sais pas, je ne l’ai pas vu.
  • Ah oui ? Pourtant elle et Michel ne se quittent jamais.
  • Oui ils ont l’air très amoureux ces deux-là.
  • Oui… en effet.
  • Dites c’est loin ?
  • A deux kilomètres de Hambourg, près de Winsen, vous connaissez la région ?
  • Pas du tout, menti Charlie qui s’était rendu à Hambourg dans son passé irlandais.
  • A cette heure il n’y a pas trop de circulation, nous y serons dans un quart d’heure.

Sans grande surprise il gardait les enfants dans une maison isolée d’un quartier déserté entre la grande ville et la ville de banlieue. Une maison à deux étages et un sous-sol où, sans surprise non plus, il les entraina. Ils descendirent un escalier droit puis suivirent un couloir jusqu’à ce qui avait l’apparence d’un cellier vide. Charlie était sur les nerfs, il revivait ce qu’il avait déjà vécu en Turquie deux mois auparavant, et ce n’était pas un bon souvenir. Troi débarrassa un casier et poussa sa main à l’intérieur, actionnant un panneau coulissant. Derrière il y avait deux cages assez grandes pour accueillir une dizaine d’enfants chacune. Les cages étaient vides.

  • Qu’est-ce que ça veut dire ? Gronda Charlie en se crispant sur son automatique
  • Bienvenue dans votre nouveau chez vous ! S’exclama Troi.

Alors tout alla très vite, un géant surgit derrière Aslan et le frappa de sa batte de baseball dans les genoux avant de le cueillir en pleine figure tandis que Troi et deux autres gars débarqués avec le géant, sautaient sur Charlie, d’une balayette le faisait tomber et avant qu’il ne parvienne à sortir son arme ou même à faire feu, lui injectait une dose d’héroïne. Le shoot fut si violant, si délicieux en même temps qu’il se laissa finalement désarmer tandis qu’une partie de son esprit s’insultait en gaélique. Combien de temps il disparut du monde conscient ? Il n’en eut qu’une idée vague quand il émergea et qu’il regarda Aslan dans l’autre cage. Ils l’avaient roué de coups et le pauvre était couché, le visage tuméfié, la bouche ensanglantée, qui clignait des yeux en le regardant silencieusement.

  • Je suis désolé, grommela Charlie quand on entra dans la cave.

C’était Troi et le Serpent en personne, accompagné d’un chevelu à croix gammée.

  • Vous nous avez fait courir monsieur Ira, mais tout a une fin n’est-ce pas ?
  • Comment t’as su ?
  • Vous vous pensez malin sans doute mais dans le genre de transaction que nous menons il y a des codes. Michel en a employé un à votre insu, de sorte que nous savions qu’il y avait un problème… Et puis quand nous avons parlé dans la voiture, à propos de Ruth et de Michel… si vous les aviez réellement connus vous sauriez qu’ils n’étaient pas mariés mais frère et sœur.
  • Crois pas que vous allez vous en sortir comme ça, j’ai prévenu du monde.
  • Je ne pense pas non, et d’ailleurs où vous chercheraient-ils ? Par contre nous, nous avons appelé quelqu’un que vous connaissez bien…
  • Vas-y grand tu peux venir ! Dit le chevelu alors qu’entrait en effet une vieille connaissance.
  • Oh non c’est pas vrai ! Grommela Charlie.
  • Salut alors comme on se retrouve ! Lança Bobo joyeusement.
  • Tiens, ça manquait de connard on dirait, gronda Charlie un peu plus fort.
  • Oui, tu te souviens de ça mon vieux ? Demanda-t-il en levant sa prothèse. Ils font des trucs formidables de nos jours tu sais, regarde.

Il ôta la fausse main et actionna un bouton sur son avant-bras, faisant apparaitre une pince.

  • Ca pour arracher les clous c’est super pratique, tu vas voir quand je vais t’arracher les couilles avec. Et ça…

Il actionna à nouveau le bouton, la pince disparue à l’intérieur du bras laissant place à une petite scie électrique.

  • Ça c’est mon gadget préféré, t’imagines bien pourquoi, dit-il en faisant tourner la lame.
  • Celui-ci y doit un bras à mon frère, expliqua le chevelu en montrant Aslan.
  • D’accord… alors lequel des deux veut commencer ?
  • Nous avons besoin que monsieur Ira nous explique certaine chose, fit Troi.
  • D’accord. Alors on va voir si tu tiens à ton pote… t’as le chalumeau ?
  • Ouais, fit le chevelu.
  • Je voudrais pas qu’il se vide tout de suite non plus.
  • Bah non, ricana le chevelu.

Bobo poussa la porte de la cage d’Aslan et lui sourit.

  • Coupe-coupe ? Coupe-coupe ?

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