Silence on torture.

Les Etats nazis d’Amérique. Cette ploutocratie marchande de rêve et de violence. Ce fabriquant de cadavres qui n’a quasiment jamais connu la paix en 246 ans d’existence. Premier marchand de mort au monde, près de 400 millions d’armes pour moins de 330 millions d’habitants. Ce donneur de leçon jamais apprise ayant la prétention de jouer au gendarme du monde au nom d’une mythologie fondée en 1945. Celle des « libérateurs » du pays de la liberté pour une nation qui enferme plus ses citoyens que n’importe quel pays au monde ! (plus de 2 millions de prisonniers). L’Amérique qui vient d’abolir la liberté des femmes à disposer de leur corps, comme des talibans moyens, et qui enferme les opposants à sa tyrannie dans le camp de concentration de Guantanamo. Cette Amérique des banksters et des criminels de guerre en liberté a décidé de torturer et tuer lentement un journaliste, Julian Assange.

Son crime ? Avoir dénoncé les agissements de l’armée américaine en Afghanistan et en Irak, cette guerre criminelle fabriquée par des voleurs et des assassins. Cette guerre qui a fait plus de deux millions de morts dont une partie purement et simplement massacré et/ou torturé par une armée américaine complètement dévoyée, au service des pétroliers et des néo conservateurs. Ce n’est pas la première fois que le Pentagone doit faire face à des révélations sur la façon dont les américains ont de faire la guerre. En 1971 déjà Daniel Ellsberg, futur soutien d’Assange, faisait publier dans le New York Times, les désormais célèbres Pentagone Papers. Un document brûlant qui sur sept mille pages dénonçaient l’implication politique et militaire des Etats-Unis au Vietnam depuis 1955. Et dénonçait notamment l’emploi de la torture et de l’assassinat systématisé lors du Programme Phénix. Mais en 71 Nixon était sur la sellette, les journaux n’avaient pas été encore soumis au capitalisme financier, les milliardaires ne contrôlaient pas encore la planète et surtout le public était exigeant en matière de contenu et d’informations. Les temps ont changé, et Julian Assange l’avait bien compris dès les années 90 alors qu’explosait la bulle internet.  Hacker dès son adolescence, cyber anarchiste et petit génie de l’informatique, cet australien d’aujourd’hui 50 ans, né pile poil l’année des révélations du New York Times, vit désormais un enfer au quotidien pour avoir osé toucher la vérité du doigt. Et si le monde moderne devait retenir aujourd’hui une figure mythologique au sujet d’Assange face à la mythologie du pays de la liberté, ça serait celui de Prométhée au foie éternellement dévoré par le faucon américain.

Oui Assange a compris dès les années 90 à quel point l’accès à l’information était asymétrique entre les états et les citoyens. Anarchiste dans l’âme son but était donc de révéler ce que nous cachaient ces états ceci afin de minimiser le pouvoir de ceux-ci en tant que détenteurs principaux de l’information. Des états mais également de leurs dirigeants… Puisqu’il ne s’est pas seulement attaqué à la très puissante et tyrannique Amérique mais a également dénoncé les agissements de certaines banques offshore russes, et les circuits de corruption de quelques dictateurs africains. En 2010 c’était à travers le site Wikileaks la révélation de la vidéo depuis baptisée « Collateral Murder » où on voyait, caméra embarquée depuis un hélicoptère d’attaque, le massacre gratuit de quelques civils prit à tort pour des terroristes. Des bouts d’hommes débités par une mitrailleuse lourde, une certaine idée de la démocratie américaine. Document fourni courageusement par Chelsea Manning au risque d’être poursuivi pour haute trahison. Toujours en 2010, Wikileaks révèle que les Etats-Unis ont torturé sans raison des centaines d’irakiens, scandale qui faisait déjà écho à celui mis à jour par Amnesty International en 2003 autour de la très sinistre prison d’Abou Ghraib. Et fin novembre 2010 Wikileaks publiait des mémos confidentiels échangés par la diplomatie américaine. Acte que la secrétaire d’état Hillary Clinton qualifia « d’attaque contre la communauté internationale » car bien entendu l’Amérique c’est le monde ou bien est-ce parce que Wikileaks a également révélé les crimes de guerre du Royaume Désuni, son allié dans l’abjection ? Mais la bombe viendra des révélations de 2011 quand toujours à travers Wikileaks des identités seront dévoilés, grillant des agents afghans, des opposants chinois, des journalistes éthiopiens, divers défenseurs des droits de l’homme. Action que désavouera la plupart des journaux qui le soutenaient et même des anciens de Wikileaks. Bref une bien mauvaise publicité et qui est probablement le fait des américains eux même puisqu’ils avaient été avertis de l’imminence de la publication, à temps pour que les sources se mettent à l’abri. Mais peu importe les intérêts personnels prime ici, et ce ne sont pas ceux de l’américain moyen ni de sa sécurité, mais bien des Blair, Bush, John Major, Rumsfeld le nigaud et le très malin Dick Cheney. Ainsi que toute la clique de leurs associés de Paul Wolfowitz à Colin Powell en passant par le sinistre Colonel Steele, inconnu du grand public mais hélas trop connu des salvadoriens comme des irakiens. Un criminel de guerre comme adore en utiliser les Etats-Unis pour ses basses œuvres.

Comme Edward Snowden l’a lui-même révélé, la NSA sous le prétexte de cette guerre perpétuelle appelée « guerre contre le terrorisme » surveille tout le monde. Non seulement ses alliés mais également ses citoyens. Une surveillance globale légalisée par le Patriot Act, et soutenu aujourd’hui par les tonnes d’informations que livrent les GAFA aux états sur leurs citoyens, dans la discrétion ouatée des médias nationaux et internationaux. Et le processus s’accélère dans toute les « démocraties » occidentales. Car personne ne veut de « printemps arabe » en occident. Or l’inflation galope, une crise boursière cyclonique nous pends au nez et plus ça va, plus les fascistes de tout bord parviennent au pouvoir. Et surtout nous vivons dans un monde fini sous le joug capitaliste d’une croissance qu’on voudrait infinie. Les Gilets Jaunes ont été un avertissement en France auquel l’état a répondu par l’exclusive répression. Mais ailleurs, en Amérique du Sud notamment ou également à Hong Kong, les consciences se sont réveillées et se sont révoltées, pour leur bien ou non, contre l’oppression d’un état toujours plus corrompu. Ainsi la démarche d’Assange dans cette perspective est non seulement nécessaire mais urgente. Ce à quoi les Etats-Unis et son allié anglais ont répondu par une condamnation unilatérale. Après avoir tenté de lui faire le coup du scandale sexuel pour entacher sa réputation et compromettre sa demande d’asile en Suède, la CIA l’a fait espionner avec la complicité de Scotland Yard durant les sept ans où il s’est réfugié à l’ambassade d’Equateur. On a même envisagé de l’assassiner, rien de moins, faits qui ont été révélés récemment. Malheureusement pour lui, victime des manœuvres politiques douteuses en Equateur, l’homme à qui il devait son asile politique, Rafael Correa est évincé au profit de Lenin Moreno dont Wikileaks a eu le tort de révéler un cas de corruption gravissime, selon Correa. Moreno a une dent contre son ancien président, et peut-être intérêt à rentrer dans les bonnes œuvres des américains. Assange va servir d’agneau sacrificiel, déchu de sa nationalité équatorienne, expulsé d’une ambassade où il vivait en réalité confiné dans quelques mètres carrés avec son chat. Il sera finalement arrêté le 11 avril 2019, condamné pour violation de sa liberté provisoire. Les accusations de viol en Suède ? Prescrites depuis 4 ans. Et comme c’est un dangereux terroriste et non pas un journaliste en détention provisoire, on l’envoie à la prison de haute sécurité de Belmarsh où en plus d’être soumis à l’isolement le plus complet il est torturé physiquement et psychologiquement tous les jours. En mai 2019, un mois après son incarcération, Nils Melzer, un juriste suisse spécialiste en droit international, et rapporteur auprès de l’ONU, ainsi que deux experts médicaux spécialisés dans l’examen des victimes de torture rendaient visite à Julian Assange et indiquaient à son sujet : « En plus de maux physiques, M. Assange présente tous les symptômes typiques d’une exposition prolongée à la torture psychologique, une anxiété chronique et des traumatismes psychologiques intenses. ». Constat confirmé en octobre 2019 par Craig Murray, ancien diplomate et militant des droits de l’homme, lors de sa première apparition publique depuis son arrestation. « Pour avoir assisté en Ouzbékistan aux procès de plusieurs victimes de tortures extrêmes et avoir travaillé avec des survivants de Sierra Leone et d’ailleurs, je peux vous dire que Julian présente exactement les symptômes d’une victime de torture ». En février 2020 un groupe de 117 médecins de 18 pays, publiait un communiqué dans la très sérieuse revue The Lancet appelant à ce que cessent les tortures à l’égard d’Assange et à sa libération immédiate.  Action renouvelée en juin avec cette fois plus de 200 médecins de 33 pays. Mais peu importe que le monde supplie, l’Amérique, quel que soit son administration, Trump, Biden, Bush, Obama, veulent uniformément la peau du lanceur d’alerte. La demande d’extradition est rejetée par les anglais ? les américains font appel et obtiennent qu’Assange soit expulsable vers les Etats Unis où l’attend un procès perdu d’avance et où il risque jusqu’à 175 ans de prison. Car le Pentagone ne décolère pas devant l’affront, pas moins de 17 nouveaux chefs d’accusation pour espionnage ont été élaboré de toute pièce par les Etats-Unis à son encontre. Or, de facto, peuvent être accusé de complicité d’espionnage tous les journaux ayant publié du contenu Wikileaks, comme le New York Times, le Guardian ou Médiapart. Et d’ailleurs la « justice » américaine a déclaré se réserver le droit de continuer les poursuites si nécessaire contre Assange et de trouver d’autres chefs d’accusation. Ainsi l’on peut clairement définir deux faits avérés désormais, Assange est un prisonnier politique dont la vie est en danger, mais au-delà de ça c’est la liberté de la presse dans son ensemble qui est en danger partout dans le monde. Cette fois c’est officiel, la guerre est déclarée entre les états et leurs citoyens.

Panama Papers, Pandora Papers, affaire Epstein et la myriade de scandales depuis la crise de 2008, Enron, Kobe Steel, Apple, Facebook, Uber, Volkswagen, BP… etc… Et qu’est-ce que cela a changé ? Dans le scandale financier qui a éclaboussé HSBC, accusée de blanchir l’argent des mafias, vieille habitude de la banque depuis sa fondation, HSBC s’est contentée de payer une amende de deux milliards et demi avant de licencier quatre mille de ses employés. Dans le cadre du scandale sexuel Epstein, deux « suicides » suspects plus loin et pas un rappel dans la presse mainstream, de toute manière aux ordres. Panama Papers ? Pandora Papers ? Quelques révélations et ce qui aurait dû normalement exploser à la figure des puissants de ce monde a disparu lentement des rédactions et des préoccupations d’un grand public endormi. Car s’il faut bien constater l’asservissement d’une large partie de la presse aux milliardaires et aux groupes globaux qui les possèdent. On ne peut pas non plus faire l’impasse sur l’indifférence grandissante d’un public gavé des éructations d’un Pascal Praud ou d’une Elisabeth Levy avinée. Des ricanements d’Hanouna sous cocaïne. Un public qui préfère montrer son cul sur Tik Tok ou se gaver de sa série favorite plutôt que d’ouvrir un livre. Un public dont le vocabulaire et l’intelligence s’appauvri au contact de ses écrans perpétuels et d’une bêtise et d’une médiocrité généralisées, sponsorisées, célébrées. Et de ça aussi Assange est en train de mourir. De notre indifférence. Récemment sa compagne révélait qu’il avait été victime d’un AVC qui l’avait diminué. Cet homme, héros des temps modernes, ne va peut-être même pas être capable de se défendre lors du procès bidon que lui promettent les américains. Et au « pays des Droits de l’Homme » selon cette expression consacrée usée, en dehors de Mélenchon et d’une poignée de députés, personne pour réclamer qu’on lui accorde le droit d’asile, le gouvernement moins que les autres. Et pour cause on ne va pas demander à un bankster parvenu au pouvoir de soutenir l’ennemi intime de son donneur d’ordre.

Alors la tentation est grande de se dire que tout ça, toutes ces révélations ne valent finalement pas le coup. Qu’au bout du compte la surveillance globale a peut-être du bon si « on n’a rien à se reprocher » comme le suggèrent les crétins. C’est bien là-dessus que jouent les médias globaux et surtout ceux qui les possèdent, lasser le public, lui donner uniquement des sucreries à se mettre sous la dent, et réduire le champ du politique a des insultes et des bons mots vite fait. C’est bien là-dessus qu’insistent les algorithmes de Twitter, Facebook ou de YouTube, ne pensez pas, dormez, distrayez-vous et surtout, surtout ne vous mêlez pas de nos affaires. Julian Assange est là pour nous rappeler qu’il ne faut en réalité jamais baisser les bras. Que le combat ne fait que commencer et que la situation, de toute manière, va probablement empirer au sujet de nos libertés individuelles et de la liberté de la presse, et si vous ne me croyez pas demandez à Macron et à Biden !