Le monde d’après

Un panache de fumée s’élevait encore de l’Elysée à demi calcinée dans l’aube laiteuse et évanescente d’un Paris qui se réveillait avec la gueule de bois.  Le pavé arraché était jonché de cadavres, des impacts de balles sur les murs haussmanniens, des barricades déglinguées, des secouristes de rue occupés à soigner les blessés qui gémissaient en écho dans les rues de la capitale, le monde d’après. Macron et sa femme étaient en fuite, on cherchait toujours Edouard Philippe. Dans la cour de Matignon, une longue file de prisonniers attendaient d’être tondu, Jean-Michel Apathie, Yves Calvi, Patrick Cohen, Michel Cymes, Roselyne Bachelot, Pascal Praud, Eric Zemmour… Le gars derrière la tondeuse était un ancien coiffeur-tatoueur branché dark rock et bondage japonais, il s’éclatait à leur faire des coupes improbables. Dans un coin Sibeth N’Diaye pleurait en tripotant la fraise rose qui lui avait taillé et qui flottait sur son crâne comme une enseigne, les gardiens, des flics passés du côté des insurgés, rigolaient bien. Sarkozy, Buzyn, Veran et Hollande n’avaient pas eu ce privilège. Ils attendaient tous ensemble à l’exception de Sarkozy, entassés dans une des cellules insalubres de la Santé, gardés par des voyous des quartiers armés jusqu’aux dents. L’ancien président et sa chanteuse de femme patientaient tous les deux à Roissy sous bonne garde, un vol qui devait bientôt les expulser du pays avec quelques-uns de leurs amis. Dans un coin un écran télé relatait les évènements de la journée dans le monde. La guerre civile qui avait également éclaté à New York et à Washington D.C et fait plusieurs dizaine de milliers de morts qui venaient s’ajouter à ceux de la pandémie qui avait précédé les événements. Poursuivi dans les rues de la capitale par une horde de féministe à la tête de laquelle se trouvait Melinda, Trump avait fini par être lynché et pendu par les couilles à un réverbère avec la totalité du staff de Fox News. La même chose ou presque était arrivé aux sièges de CNEWS et BFMTV, ravagés par les flammes, le personnel des journalistes diversement poursuivis dans les rues et mis en pièce.

  • Tu vois Carlitta on s’en sort plutôt bien, glissa l’ancien président à sa femme alors que la caméra filmait Ruth El Krieff courant dans les rues poursuivie par une horde de Gilets Jaunes à la veste éclaboussée de sang séché.
  • Vous deux, par ici, ordonna un grand costaud en s’approchant, un Famas en bandoulière, une veste camouflage volée sur le dos. Il portait un masque FFP2 avec dessiné dessus un crâne et deux tibias. Le couple obéit aussi tôt. Ils tiraient deux grosses valises Gucci avec eux, on les chargea à bord d’un jet privé.
  • Bonjour Monsieur le Président, fit le steward avec un sourire avenant.

C’était la première fois qu’on lui donnait du président depuis qu’on l’avait tiré de son sommeil l’avant-veille, il ne put s’empêcher de sourire.

  • Oh bonjour, où nous conduisez-vous ?
  • Je suis désolé Monsieur le Président je ne peux pas vous le dire.
  • Oh allons, nous sommes entre nous et à qui voulez-vous que je le raconte ? Insista Sarkozy en prenant son ton enjôleur de montreur de foire.
  • On avance et on ferme sa gueule ! Beugla le grand costaud derrière eux.

Le couple obéit et pénétra à l’intérieur, aussi tôt accueilli par la voix mélodieuse et mondaine d’Arielle Dombasle.

  • Bonjour chers amis !
  • Arielle !? tu es là ? Et toi aussi Bernard-Henri mais c’est merveilleux !

Bernard-Henri Levy releva son front haut et grave de penseur concerné du livre qu’il tenait entre ses mains. Il avait les cheveux tondus en une triple crête bleu blanc rouge. Ils lui avaient fait ça juste avant de prendre la direction de l’aéroport. Carla failli éclater de rire.

  • Comme c’est drôle non !? Fit Arielle avec son sourire parfait de vieille Barbie.
  • Je ne vois vraiment pas ce qu’il y a de drôle ! S’emporta le philosophe de salon.
  • Oh allons prenez les choses du bon côté, nous raserons tout ça à Marrakech !
  • A Marrakech ? Nous allons à Marrakech ? S’enquit Sarkozy.
  • Et bien où pourraient-ils nous envoyer d’autres ?
  • Bin je ne sais pas, dans un coin moins sympa…
  • Allumons la télévision nous verrons ce qui se dit sur nous, proposa le philosophe tout à fait certain que son enlèvement et sa tonte avait fait la une des magazines en continue.

Sauf qu’il n’y avait plus de chaine en continue, il y avait un canal unique avec Cyrill Hanouna en slip léopard au milieu d’un bain de boue avec de chaque côté du bain, Sibeth N’Diaye et sa fraise et Marlène Schiappas à qui le savant et facétieux coiffeur avait taillé un petit gilet jaune fluo sur l’arrière du crâne en guise de chevelure. Tout le reste avait été coupé ras. Les deux femmes portaient des bikinis rouges qui faisaient rebondir leurs formes replètes. Autour du bac de boue se tenait une foule hurlante derrière des grillages, ça huait, ça rigolait, ça faisait des commentaires salaces, la foule quoi, bête, avinée, et accessoirement heureuse. On avait renversé cette république de pourri, on allait tout reconstruire, tout, mais en attendant les divertissements avec les commentaires d’Hanouna en fond sonore. Obligé de s’égosiller et de trouver ça marrant. Il avait l’habitude mais là c’était des amies qu’on humiliait ainsi que lui et ça n’avait plus le même goût que lorsqu’il recouvrait ses animateurs de chocolat ou en remplissait le slip de nouilles.

  • Allez mais petites poulettes soyez pas darka comme ça, c’est marrant non ?

Une giclée de boue vola vers son visage.

  • Et celle-là tu la trouves marrante !? Hurla Sibeth
  • Eh mais oh l’autre il a rien fait ! Protesta Marlène.
  • Oh toi ta gueule ! On n’en serait pas là si vous m’aviez tous écouté !
  • Quoi ? T’écouter toi !? Mais t’as jamais dit que des conneries ma pauvre fille ! T’es même pas foutu de mettre un masque ! Railla l’ancienne Secrétaire d’Etat.

S’en fut trop pour l’ex porte-parole. Même ses enfants s’étaient moqué d’elle après cette dernière sortie, ça et toute la toile, des millions de personnes qui aujourd’hui la regardaient avec sa coupe ridicule foncer dans Marlène Schiappas.

  • Aaaah enfin ! S’anima l’animateur avec un sourire forcé.
  • Dix dollars sur la grosse Schiappas.
  • Tenu

Dans un des salons dévastés de l’Elysée, le gouvernement provisoire regardait la télé. Il y avait Momo d’Aubervilliers, l’avocat Gilet Jaune François Boulot, Madame Lucette, montée de la Drôme avec son mari, le colonel de gendarmerie Michaud, Abdel et Kader, Boris, maitre-chien et son fidèle berger malinois Patrick, le penseur Frank Lepage, et surtout il y avait Machin. C’était Machin qui avait appelé à l’émeute généralisé, Machin qui sur les réseaux sociaux s’était attaqué au gouvernement, une punch line par minute reprise par tous les médias comme le bon sens populaire. Machin que personne n’avait jamais vu jusqu’à ce qu’il se laisse inviter par Jean-Jacques Bourdin dans son émission hebdomadaire. Bourdin en fut pour ses frais, à peine l’interview avait commencé que des intermittents du spectacle déboulaient sur le plateau et le prenaient en otage à la pointe de leurs fusils. Les armes avaient été fournies par un escadron de gendarmerie à demi décimé par le covid-19. Depuis la pandémie s’était ralentie, on n’avait pas encore trouvé de vaccin mais tout le monde était à la chloroquine. Machin avait voulu inviter Raoult, interviewé l’ex ministre de la Santé mais l’éminent professeur avait ronchonné qu’il n’avait pas de temps pour ces bêtises.

  • Ooooh ! S’exclama Machin alors que Shiappas venait de faire basculer N’Diaye dans la boue d’une savante prise de judo.
  • Dis donc elle assure la grosse.
  • Je t’avais dit elle a la niaque.

La grosse fraise plongea dans la boue et se releva comme un drapeau en berne gluante de boue rouge.

  • Je vais te niquer salope ! Hurla-t-elle avant de se jeter sur Schiappas qui la prit de plein fouet.

Les deux femmes roulèrent dans la gadoue sous les gueulantes joyeuses de la foule. Un sein s’échappa, un coup de poing parti, un autre, N’Diaye prit le dessus, mordant à pleine dent l’oreille de sa partenaire qui finalement la repoussa des deux pieds. N’Diaye cracha du sang et un bout de lobe. Les deux femmes étaient essoufflées, elles se jaugeaient attendant que la première tente quelque chose quand soudain deux tronçonneuses tombèrent au milieu de l’arène. . Un silence de mort enveloppa la foule, on passait aux choses sérieuse cette fois.

  • C’est quoi ces conneries ? Gronda Machin
  • C’est une idée des fonctionnaires qui travaillaient pour elles, expliqua l’avocat laconique.

Les moteurs des tronçonneuses étaient en train de démarrer quand Bernard-Henri ordonna qu’on coupe l’image.

  • Oh mais pourquoi !? Protesta Carla Bruni-Sarkozy. Ca commençait à devenir si drôle !
  • Si ce genre de spectacle vous amuse ma chère, je vous suggère les jeux du cirque ! Rétorqua Bernard-Henri Levy en retournant à sa lecture.
  • Oh allons BH même vous disiez que c’était deux parvenues, intervint Dombasle.
  • Ce n’est pas une raison pour accepter ce genre de chose !
  • Ah tient on décolle, fit remarquer Sarkozy.
  • Je me demande vraiment où ils nous emmènent, fit Carla en ouvrant distraitement une de ses valises pour sortir une splendide robe en mousseline verte de chez Dior. Tu crois que j’aurais encore l’occasion de la mettre ?
  • Ca m’étonnerait, grommela Sarkozy en se renfonçant dans son siège.
  • Allons Nicolas ne vous laissez pas aller aux mauvaises vibes, nous sommes en vie non !
  • Oui mais pour combien de temps !? glapit l’ancien président.

La triple crête du philosophe se redressa alors que le steward rentrait dans l’allée, poussant devant lui un chariot. Il y avait de tout, du champagne, du foie gras, du caviar, des œufs coqs tièdes saupoudrés de truffe.

  • Oh mais c’est fabuleux ! S’exclama Carla en se précipitant sur le champagne.
  • Attends !

Elle se retourna.

  • Bah quoi ?
  • Qui vous a demandé de nous servir ça ? Grogna Sarkozy.
  • Mais qu’est-ce qui te prends chéri ?
  • Machin monsieur le président.
  • Machin ? Et si c’était empoisonné ?
  • Oh allons Nicolas et ils nous feraient prendre l’avion exprès pour ça ?

L’argument se tenait mais Sarkozy se méfiait quand même.

  • Laisse le goûter d’abord ! Dit-il en désignant le steward du doigt.
  • Moi monsieur le Président ? Mais je n’ai pas le droit !
  • Alors nous n’y toucherons pas ! Menaça l’ex président

Le steward était ennuyé, il avait des ordres et ces ordres aussi curieux pouvaient-ils lui sembler c’était de leur servir cette collation.

  • Je vais voir avec mon chef de cabine

Quelques secondes plus tard il revenait avec une accorte jeune femme cintrée dans une tenue d’hôtesse qui minauda un sourire à faire grincer des dents les deux botoxées.

  • Un problème monsieur le Président ? Demanda-t-elle.

Sarkozy retrouva aussi tôt son ton d’enjôleur de foire, son épaule droite tressautant sous l’impeccable de l’alpaga.

  • Pourquoi on nous sert ça ?
  • C’est un cadeau d’adieu monsieur le Président. De la part de Machin en espérant, je cite, ne jamais revoir vos sales gueules.
  • Trop aimable, se crispa Sarkozy.
  • Tu vois chéri il espère ! Ca veut bien dire ce que ça veut dire !
  • Voulez-vous que nous trinquions tous ensemble ? Proposa la cheffe de cabine. Je serais tout à fait honoré d’être votre gouteur si vous le désirez.
  • Oh euh… mais non….
  • Allez, mais, si, bien sûr approuva Arielle Dombasle en s’approchant du chariot. Champagne for all and let’s be happy. Soyons joyeux ! Come on Nicolas…
  • Bon, bon….

La cheffe leur servit chacun une flute préalablement glacée, sortie d’un petit congélateur.

  • A quoi buvons nous ? Demanda la jeune femme.
  • Mais à la vie bien sûr ! S’écria Arielle, to life !

Ils trinquèrent à ça, à la vie, Carla se fendit même d’un petit lechaïm  avec BHL pour faire plus stylé. Et tant pis si elle n’était pas juive. A la vie donc. Après quoi ils dévalisèrent le chariot de ses victuailles sans remord.

  • Finalement il est plutôt sympa ce Machin, fit Arielle entre deux bouchées de caviar.
  • Sympa ? S’insurgea BHL Dois-je vous rappeler ce qu’ils ont fait subir à nos amis et à nous-même ?
  • Drahi, Bolloré, Niels, Lagardère, Dassault, Arnault, à Fresnes ! Rappela Sarkozy qui avait vu les images à la télé comme tout le monde.
  • Jacques et Jack lynchés ! S’insurgea BHL.
  • Alain Minc pareil !
  • Oui, oui, bon, bon, mais nous, nous sommes en vie non !?
  • Oh mais attendez, qu’est-ce que c’est que ça ? Demanda soudain Carla qui venait de découvrir un nouveau compartiment dans le chariot. Elle l’ouvrit et tomba sur une boite en argent. Mais qu’est-ce que c’est ?

La boite était pleine d’une poudre blanche et de pétards bien roulés

  • Vous ne croyez tout de même pas que c’est….
  • Bah voilà autre chose ! S’exclama Sarkozy.

Arielle Dombasle et son mari s’approchèrent l’œil brillant.

  • Et si c’était empoisonné ? Insista à nouveau Sarkozy.
  • Oh Nico tu nous embête avec tes histoires de poison, dit Carla en se mettant de la poudre blanche sur les gencives. Ouh c’est de la bonne !

Quelque part dans Paris Sibeth N’Diaye et Marlène Schiappas croisaient le fer, lame de tronçonneuse contre lame, des gerbes d’étincelles illuminant le bain de boue. Sibeth avait le dessous, le ventre entaillé. Quand Machin et le gouvernement provisoire tout entier entra.

  • Non mais ça va pas bande de connard ! Vous croyez qu’il y a pas assez eu de morts ! Arrêtez moi ça tout de suite !
  • C’est pas toi qui commande ! d’abord t’es même pas un vrai Gilet Jaune, protesta quelqu’un dans la foule.
  • J’en ai rien à branler de ton gilet jaune ! C’est pas avec des gilets qu’on va reconstruire ce pays c’est tous ensembles !
  • Tous ensembles ? Nous ont veut pas d’elles ! Qu’elles crèvent elles nous ont assez fait chier ! Protesta un autre, médecin urgentiste de son état.
  • Mais vous aviez piscine à la distribution de cerveau ou quoi ? Je veux pas d’elles non plus mais moi je veux pas les voir par petits bouts à quoi ça va nous servir !?
  • De toute façon pour ce qu’elles servaient avant remarque, fit Frank Lepage dans son coin.
  • Bin justement on n’a qu’à les mettre au turbin.
  • Oui mais quoi ?
  • On trouvera bien.

Dans l’avion l’ambiance s’était considérablement réchauffée depuis la découverte de la drogue. Carla avait sorti la guitare et chantonnait de sa voix aphone en partageant un joint avec Arielle, Nicolas et Bernard-Henri devisaient en s’essuyant le nez de la coke qu’ils venaient de priser avec ces dames.

  • Je dois reconnaitre que ce Machin est de la race des Rebatet et des Doriot, un dangereux réactionnaire mais il sait vivre.
  • J’avoue. Tu crois qu’Emmanuel va s’en sortir ?
  • Il est parti se réfugier en Allemagne comme De Gaulle en 68, chez son ami Cohn Bendit, il espère faire le même coup que le Général.
  • Retourner l’opinion en sa faveur et revenir ?
  • J’en ai peur.
  • Mais s’il revient il se fera lyncher !
  • J’en ai peur aussi mais tu sais comment est Brigitte une indécrottable optimiste, et puis ils sont parti avec une partie du staff des communicants qui conseillaient l’Elysée…
  • Les mêmes qui lui ont conseillé de poursuivre la réforme hospitalière après le déconfinement ?

La triple crête s’agita gravement.

  • Oui les mêmes…
  • Des génies…
  • Et c’est pourtant pas faute de lui parler mais il ne m’écoutait pas comme toi…
  • Et puis est arrivé Machin.
  • Balthus de Malepasse tu veux dire ?
  • C’est son vrai nom ?
  • D’après Médiapart oui, Plenel espérait que révéler ses origines nobles réduirait son influence mais venant d’un SDF forcément….
  • Un SDF avec une grande gueule qui a suffisamment fait de petits boulots et connu de galère pour pouvoir parler au nom de tous.
  • Un petit fasciste tu veux dire. Un petit fasciste qui ne tardera pas à dégager quand leur révolution dévorera ses enfants, toutes les révolutions le font.
  • Oui mais où serons-nous d’ici là ?
  • Ne t’inquiètes pas Nicolas, je connais très bien le roi du Maroc.
  • Mais moi aussi je connais très bien Mohamed VI mais qui te dis qu’on va au Maroc ?

Le philosophe montra le chariot.

  • Et bien ça ! Il nous envoie en exil c’est évident sinon nous serions à la Santé ou à Fresnes…. Surtout toi Nicolas si je puis me permettre.

L’épaule tressauta sous la veste en alpaga.

  • Qu’est-ce que ça veut dire ça, surtout moi ?
  • Bah quand même tu n’es pas blanc bleu tu as quelques affaires sur le dos…
  • Des racontars et des coups montés ! Se défendit l’ancien président.
  • Oh allons Nicolas, nous ne sommes plus devant les caméras !
  • Oui bon ça va pourquoi t’en n’as pas des affaires toi peut-être !? Et Botul ?

Le philosophe ne répondit rien, agitant ses trois crêtes comme s’il avait encore ses belles boucles de penseur.

  • Qu’est-ce qui se passe boys vous vous disputez ? Demanda Arielle alors que Carla, défoncée, accumulait les fausses notes.
  • Mais non, mais non, je rappelais juste à BH que nous avions tous les deux quelques casseroles aux fesses.
  • Oh la, la mais quel importance ! Tout ça ne compte plus maintenant ! Seule la postérité est juge Nicolas.
  • C’est pas de toi ça.
  • Non c’est de moi, confirma BHL.
  • La postérité tu parles ! Railla Carla qui en plus d’être défoncée était saoule. C’est des conneries de péteux de salon !
  • Carla ma chère vous devenez vulgaire, dit BHL avec hauteur.
  • Et alors ça te défrise le cul ? Tu t’es vu avec tes crêtes ? Elle où ta postérité là ? Celle de Bozo le clown ?
  • Carla ça suffit ! Intervint son mari.
  • Bah quoi, j’ai pas raison peut-être ?
  • Non et je ne te permets pas de te moquer de Bernard-Henri ce qui lui est arrivé est horrible !
  • Oh la, la une pauvre coupe de cheveux, ça repousse les cheveux !
  • Pas des implants à quatre mille euros le cheveu ! Explosa soudain le philosophe.
  • Quatre mille euros ! Mais vous êtes allé où ? S’exclama Carla en arrêtant de gratter sur sa guitare des mélodies sans queue ni tête.
  • Chez moi au Mexique, précisa Arielle.
  • Bin mon con !
  • J’y pense, dit BHL avec l’œil du soupçon pourquoi ça t’es pas arrivé à toi Nicolas ?
  • Arrivé quoi ?

Le philosophe par intérim montra sa coupe de punk à chien d’un geste mou et suffisant. Le visage de l’ex-président se décomposa.

  • Oh… euh eh bien je ne sais pas….
  • Mais si y sait ! Intervint Carla agacée, j’ai sucé.
  • Tu as quoi ? S’exclama Dombasle.
  • J’ai su…
  • Carla ça suffit ! Et maintenant arrête avec ce champagne.

Il attrapa la bouteille qu’elle buvait au goulot et la replaça dans le seau d’autorité.

  • Nico t’es pas grand mais question faux cul et chieur t’es un géant ! rétorqua-t-elle avant d’expliquer aux autres : J’ai sucé nos gardiens l’un après l’autre, huit bites !
  • Et ça lui évité le coiffeur !? S’exclama Dombasle.
  • Bah j’suce bien !
  • Si j’avais su….
  • Oh regardez la mer ! Fit soudain le philosophe en carton en regardant par le hublot.

Ils se précipitèrent tous les trois pour aller regarder.

  • C’est laquelle ? La Manche ou la Méditerranée vous croyez ? Demanda Sarkozy
  • Difficile à dire à cette distance, fit remarquer BHL.
  • Vous croyez qu’on peut voir des migrants se noyer d’ici ? gloussa Carla
  • Carla tu n’es pas drôle ! Tança son mari.
  • Oh la, la, et toi tu manques d’humour !
  • Il a raison, vos blagues sont de mauvais goût, jugea BHL. C’est un véritable drame humain vous savez.

Elle haussa les épaules.

  • Comment si tu en avais eu jamais quoi que ce soit à foutre.
  • Oh Carla, BH a toujours été très concerné par…. Commença par protester la femme du penseur.
  • Son petit nombril on sait.

Et sur ce elle s’accorda une nouvelle ligne.

  • Ah putain je pète la forme moi ! Vous voulez que je vous interprète quoi ? Demanda-t-elle en reprenant sa guitare.
  • Oh tu connais « Time are changing » de Bob Dylan ? Demanda Dombasle
  • Bien sûr !

Elle commença à jouer, chantant de sa voix aphone, bientôt reprise en chœur par sa consœur tandis que les deux hommes contemplaient les vagues qui défilaient sous les ailes de l’avion.

  • Tu crois qu’on sera bien accueilli où qu’on aille ?
  • Bien entendu, il n’y a pas de raison, je te rappelle que nous comptons encore dans le monde.
  • Tu crois ?

Sarkozy avait l’air d’en douter.

  • Bien sûr, assura avec confiance l’intellectuel au front haut. D’ailleurs je compte bien faire un appel dès que nous serons en territoire ami.
  • Un appel ?
  • Eh bien oui à la contre révolution ! A renverser ce Machin et ses acolytes, nous comptons encore de nombreux partisans là-bas tu sais.
  • Comme De Gaulle en Juin 40 ? Ironisa Sarkozy.

Mais l’ironie échappa complètement au philosophe.

  • C’est un bon exemple, accorda-t-il mais je préfère le J’accuse de Zola, car il est temps que nous dénoncions cette chienlit qui s’est emparé de la France.
  • Je te rappel que tu as déjà essayé, combien d’articles tu as écrit contre Machin et ses copains, quatre, six ?
  • Sept, reconnu piteusement le philosophe de salon mais cette fois ce sera différent, assura-t-il. Je connais mieux mon sujet et ce Machin sera beaucoup trop occupé dans les mois à venir pour me railler en publique.
  • Mouais, grommela l’ancien président pas convaincu.

Derrière le deux épouses massacraient allègrement la chanson de Bob Dylan, drogue aidant elles chantaient assez fort pour casser les oreilles à tout le monde, le philosophe arrêta de philosopher pour les apostropher.

  • Serait-il possible que vous mettiez en pause cinq minutes mesdames ?
  • Oh mais quel mauvais coucheur vous faites aujourd’hui, rétorqua sa femme avec un grand sourire froid.

Ce genre de sourire qu’elle lui faisait quand lui-même prenait trop de drogue dans l’intimité de son bureau, persuadé qu’il était que ça influençait son génie, ou quand il cherchait à la trousser sous l’influence de ces mêmes drogues. Mais cette fois il ne se laissa pas faire.

  • Ma chère de nous quatre je crois bien que je suis celui qui a le plus de raison d’être de mauvaise humeur, ne pensez-vous pas ?

Carla Bruni-Sarkozy leva les yeux au ciel.

  • Ca y est il recommence avec ses cheveux !
  • Carla….
  • Bah quoi c’est vrai il nous saoule à la fin !

Ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase, d’un coup BHL fut debout et se précipitait sur elle, lui arrachait sa guitare des mains et fracassait par terre avec une ardeur que sa femme ne lui avait pas connu souvent.

  • MAIS IL EST DINGUE CE CON ! LA GUITARE QUE M’A OFFERTE MICK ! Hurla Carla s’emparant de la bouteille de champagne pour frapper le philosophe.

Heureusement son mari se jeta sur elle juste à temps, la bouteille vola pour exploser entre les sièges, éclaboussant tout le monde de champagne.

  • LÂCHE-MOI CONNARD ! JE VAIS LE BUTER !
  • Carla calme toi !

Il lui avait enserré les bras, appuyant de toutes ses forces, elle se débattait la bave aux lèvres, les yeux hors de la tête. Le philosophe avait prudemment reculé vers la cabine de pilotage, sa femme dans l’autre sens vers les toilettes. Derrière la porte de la cabine le steward voulu aller voir, sa cheffe lui fit signe de ne pas bouger.

  • On a reçu des ordres, on n’intervient pas quoi qu’il arrive.
  • Même s’ils cassent tout ?
  • Même s’ils cassent tout.

BHL avait levé les poings, prêt à en découdre.

  • Lâches-là Nicolas cette putain ne me fait pas peur.
  • Eh oh tu parles meilleur de ma femme le punk à chien !

Il lâcha sa femme qui partit comme un dard empoignant les couilles du philosophe avant qu’il n’ait esquissé une droite, il hurla alors qu’elle les serrait de toutes ses forces quand Arielle Dombasle s’en mêla en poussant un rugissement de lionne.

  • SALOPE LACHE BERNARD !

Elle se jeta sur sa proie toute griffe dehors, les deux roulèrent par terre, se labourant mutuellement le botox, Sarkozy tenta d’arracher Dombasle de la mêlé, provoquant aussi tôt l’hydre de BHL qui lui tomba dessus à bras raccourci. La bagarre dura jusqu’à ce que les écrans s’allument d’eux même, montrant des images d’eux en train de se battre.

  • Mais c’est nous ! S’exclama soudain Carla, l’œil poché et le visage lacéré.

Soudain la face édenté de Machin apparu en surimpression, souriant, l’écharpe présidentiel autour de la tête comme un turban, la grande croix de la Légion d’Honneur au-dessus de l’œil tel un Jack Sparrow de prestige.

  • Salut les riens, les incapables, les séditieux, les haineux, ici le patron qui vous cause mais je vous rassure je ne serais pas le patron longtemps. Pas pour moi ces trucs là. On va quand même pas répéter les mêmes erreurs que ces cons n’est-ce pas. Ca fait déjà quatre siècles qu’ils nous enculent et quarante ans qu’on leur a donné les clefs du garde-manger. Ya basta comme on dit dans le sud. Les bourgeois vont trimer maintenant et à nous les dividendes. En attendant on traduira en justice ceux qui doivent l’être et pas question de peine de mort ou de découpage en rondelle, les conneries c’est terminé. Le Référendum d’Initiative Populaire sera mis en place dans les prochaines semaines pour vous permettre de voter pour vos représentants et vos lois et d’abolir une bonne fois pour toute cette foutue Vème République. Maintenant je m’adresse aux quatre tocards dans l’avion. Comme vous venez de le comprendre votre petite fête et tout le reste la France entière vient de la regarder. A ce propos merci pour les huit queues on a bien rigolé ici. Vous vous demandez sans doute pourquoi on vous relâche comme ça avec le buffet et tout, c’est une bonne question mais avant de vous dire pourquoi j’aimerais vous dire ce qu’on pense de vous, ce que JE pense de vous. Vous n’êtes pas important mais vous avez des ambitions de piranhas, vous nous avez volé, abusé, insulté et par-dessus le marché vous êtes responsables de centaine de morts et je ne parle pas que de la Libye bande d’enfoirés. Je pense notamment à mon pote Saïd condamné à une peine planché, quatre piges dont il s’est jamais remis, il s’est suicidé deux ans après sa sortie. Et c’est toi fils de pute de Sarkozy qui a mis en place ce système, toi qui nous a enculés sur le Traité de Lisbonne, hein Paul Bismuth, l’ami de Kadhafi…Et toi le philosophopouet de mes deux, bavard de salon, narcissique connard qui nous a chié sa pensée pendant des années, à poser en costard de ville en zone de guerre, Hemingway de pacotille, Malraux de ruelle mal famée, on va te ramener à ta vie de raté sous amphétamine. Ras de terre tu vas voir. La coupe c’était que le début. Quand à vous les radasses botoxées je vous parle même pas, je vous ignore, vous avez voulu être la reine du bal des salopes ? Vous allez être servit. Direction le turbin l’aphone et c’est pas huit bites cette fois, tu vas avoir les lèvres gercées ma poule, c’est moi qui te le dis. Bref il est grand temps que je vous annonce où on vous envoie en vacance. Désolé le punk à chien pour ton appel du 18 Juin ça va pas être possible… dans environs trente-cinq minutes vous serez au large des côtes libyenne où vous attend un comité d’accueil du cru.

Il sourit largement et avança la tête vers l’objectif :

  • Bon voyage…

Et l’image se coupa net.

Les trois aveugles marchaient à la queue leu leu. On leur avait arraché les globes oculaires, ils portaient des bandages sanglant sur les cavités de leurs yeux perdus. En tête se trouvait Christophe Castaner, le préfet Lallemand suivait, Nuñez terminait la marche. Ils passèrent devant un réverbère auquel était suspendu un cadavre. Les cheveux taillés avec science, en pompons comme les caniches, on aurait presque dit une Pompadour avec le visage violet, on l’avait pendu avec sa célèbre écharpe rouge. Castaner tenait une canne télescopique qu’il faisait aller et venir maladroitement devant lui, le manque d’habitude. Il heurta la porte du supermarché. Un grand noir avec un pull marqué sécurité en travers sa vaste poitrine s’approcha avec trois sacs de course. Il les fourra dans leurs mains.

  • Tenez c’est pour vous sac à merde maintenant caltez.  
  • Euh mais on vous… vous… doit combien ? Bégaya Didier Lallemand
  • Rien, en ce moment c’est gratuit pour les handicapés et les SDF, vous êtes les deux, alors…
  • Oh euh mer… merci… en… en… ce cas.
  • Dégagez !

Dans le supermarché une caissière bavardait avec sa voisine de rangée. Bavardait avec les clients, minaudait, en faisait des tonnes. Un tract électoral à la place du sourire. Soudain sa cheffe se pointa tout juste derrière elle, l’œil sévère sur l’écran de la caisse.

  • Madame Schiappas vous n’êtes pas là pour raconter votre vie. Veuillez cesser de jacasser je vous prie.

L’ex Secrétaire d’Etat fit le dos rond dans sa blouse rose.

  • Oui madame, oui.

Et ainsi alla la vie dans la nouvelle république française, comme promis Machin quitta le sommet de l’état pour aller vivre à la campagne, ceux qui devaient être jugé le furent et cette fois dûment enfermés, le Ministère de l’Economie, auto géré, fit la chasse au gros fraudeur et récupéra des milliards on finança avec les services publiques, l’agriculture, on nationalisa les entreprises du CAC 40, On quitta l’Europe et on s’organisa en communes, et bien entendu, puisqu’on était en France on s’engueula beaucoup, chacun y allant de sa revendication.. Y eu-t-il d’autres morts ? Certes, mais on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs n’est-ce pas. L’exemple français, son exception fut à nouveau cité à l’honneur, dans le nouvelle Amérique, à Hong Kong et Beyrouth, en Afrique et donna des ailes à d’autres peuples avec plus ou moins de succès. Le covid-19 avait abattu le projet néo libérale pour des décennies, la révolte des français fini de l’achever.